'est son heure de vérité. Jean-Marie Le Pen a confié à sa fille Marine la direction stratégique de sa dernière campagne présidentielle - Bruno Gollnisch, n° 2 du FN en titre, n'est responsable que de son exécution. De sa réussite ou de son échec pourrait dépendre son propre avenir dans la course à la succession.
Avec sa nouvelle silhouette Taillefine et ses escarpins pointus, Marine Le Pen, 38 ans, véhicule une image actuelle et branchée, presque people! Elle passe chez Thierry Ardisson, discute avec les auditeurs de Beur FM, déjeune ou dîne en ville, blague avec ses collègues de droite comme ceux de gauche du conseil régional d'Ile-de-France, où elle préside le groupe FN, et n'a pas besoin de garde du corps. Elle affirme avoir reçu plus de 800 mails de sympathie après la sortie de son autobiographie, A contre-flots (Grancher). Bref, si elle suscite la curiosité, y compris chez des gens peu politisés, son entreprise de banalisation et de crédibilisation du FN est une autre paire de manches. Car, avant de séduire les électeurs, elle doit d'abord convaincre son parti.
Ses positions tolérantes sur l'homosexualité et l'avortement ont déjà fait suffoquer les catholiques traditionalistes. Elle va plus loin, aujourd'hui, en présentant le FN comme le défenseur de la République. L'idée est née il y a deux ans au vu des positions successives du ministre de l'Intérieur sur le droit de vote des étrangers, la double peine et la création du Conseil français du culte musulman. «On se demandait comment la classe politique avait réussi à nous mettre de côté, raconte Marine. Or je considère que le plus dangereux, c'est Sarkozy, car il met à bas tous les principes républicains.»
Il ne restait plus qu'à trouver un lieu et une occasion: ce sera Valmy, le 20 septembre. «Ce sera une pantalonnade, ironise un proche de Gollnisch. Personne ne se souvient de Valmy et ce n'est pas une préoccupation des Français.» «Je joue le rôle de démineur», explique Marine. Pour la campagne, elle a constitué une petite équipe d'une demi-douzaine de chefs d'entreprise extérieurs au FN, afin d' «expertiser» de nouvelles idées «pragmatiques». Comme celle, par exemple, consistant à réserver une partie des emplois de la fonction publique aux plus de 45 ans, pour résoudre le chômage des cadres. Mais elle doit balayer les préjugés internes: «Pas facile d'expliquer que les RMistes ne sont pas tous des assistés volontaires, que les homos ne sont pas tous pour le mariage, que les fonctionnaires ne sont pas tous des glandeurs et les patrons, tous des saints», soupire-t-elle, avec une grande liberté de parole. «Moi, je m'en fous, je prends tous les risques», assume la benjamine de Le Pen. Mais, au Front, beaucoup l'attendent au tournant de sa prétendue modernité.
source : l'express.fr