S'il ne parle pas encore de préparer sa succession - qu'il n'envisage pas avant les élections européennes de 2009 -, Jean-Marie Le Pen annonce "des changements" au sein du Front national lors du congrès prévu les 17 et 18 novembre à Bordeaux. "La collecte des parrainages et la campagne présidentielle ont montré des défaillances du parti. Certaines sont conjoncturelles, d'autres proviennent de nos mécanismes de fonctionnement. Je n'ai pas encore eu le temps d'y réfléchir mais je pense qu'il faut faire des réformes et que je suis le plus à même de les faire accepter par consensus", a-t-il ainsi confié aux journalistes qui le suivaient, samedi 26 mai, lors de son déplacement en Corse.
Cette résolution devrait plaire aux cadres qui, depuis la scission de 1999, réclament une réorganisation du parti. Mais eux pensent déjà à l'après-Le Pen. Chacun a son idée des réformes à entreprendre et entend la faire valoir. Deux conceptions diamétralement opposées s'affrontent. Certains plaident pour un parti "plus homogène", d'autres soutiennent un rassemblement de toute l'extrême droite, y compris les Identitaires, avec la droite extrême de Philippe de Villiers.
La première proposition est défendue par les partisans de Marine Le Pen, vice-présidente du FN, et par le secrétaire général, Louis Aliot. La seconde trouve ses partisans parmi ceux qui voyaient en Bruno Gollnisch, le délégué général, le successeur naturel à M. Le Pen, mais qui aujourd'hui penchent vers une forme collégiale. A leur tête, Carl Lang, ancien secrétaire général. " Je compte proposer à Jean-Marie Le Pen un renouvellement de la moitié des secrétaires généraux après les législatives", explique M. Aliot. "Il y aura, dit-il, des mises à la retraite et des remplacements dictés par le mauvais esprit de certains responsables lors de la présidentielle. Sans compter ceux qui ont mis des peaux de bananes sous les pieds de Marine Le Pen pendant sa campagne aux élections régionales d'Ile-de-France."
"EPINAY DE LA DROITE NATIONALE"
Au-delà de cette mise au pas, M. Aliot défend une refonte du parti (bureau politique ramassé, fin de la double structure secrétariat et délégation générale, etc.) autour d'un programme "clair tournant autour de thèmes comme la préférence nationale, la souveraineté nationale, la liberté sous toutes ses formes et l'Europe des patries". "Le Front doit rompre avec son habitude de rassemblement avec des milieux groupusculaires qui n'apportent que des ennuis", insiste M. Aliot qui vise tant les "catho-tradi de Bernard Antony" que "Bruno Mégret", président du MNR, lesquels mènent bataille contre Mme Le Pen. De même souhaite-t-il se "débarrasser" de ceux qui "veulent combattre le "lobby juif" en se cachant derrière le drapeau du FN".
A l'opposé, M. Lang estime que le Front doit s'acheminer vers un "Epinay de la droite nationale". Une orientation logique pour ce responsable qui a défendu, pour la présidentielle, l'union patriotique avec M. Mégret. "On peut survivre dans la division mais on ne peut pas gagner les élections sans un rassemblement", affirme-t-il. Selon M. Lang, il faut revenir à ce qui a prévalu lors de la création du FN, amener "tout le monde à se réunir pour réfléchir à un compromis national qui permettra de retrouver un grand parti".
Reste que quand on l'interroge sur cette idée "d'Epinay" M. Le Pen lance : "C'est de la connerie !" "Ceux qui à l'extérieur plaident pour cela ont trahi le FN et veulent revenir pour le diriger quand la succession sera ouverte", dit-il. De même ne voit-il pas d'avenir avec M. de Villiers, à qui il "ne pardonnera jamais" d'avoir voulu l'"empêcher d'obtenir ses parrainages pour la présidentielle".
source : Le Monde.fr