ean-Marie Le Pen bondit sur la scène pour la plus grande joie de milliers de militants et sympathisants venus dimanche 12 novembre, au Bourget pour les Bleu-blanc-rouge, la fête du Front national. Il a les bras en l'air et ses doigts forment un "double V : victoire au premier, victoire au second tour", explique-t-il.
Le président du FN rêve d'une revanche. Une revanche sur le deuxième tour de l'élection présidentielle de 2002 qui a vu son échec et dont il se montre frustré. "Le soir du 21 avril 2002, (j'avais dit aux Français) : "N'ayez pas peur, entrez dans l'espérance." La peur, à l'époque, a été plus forte, instrumentalisée qu'elle fut par l'ensemble des forces du système", regrette-t-il. Il reprend la campagne là où il l'avait laissée, déterminé à montrer que son parti n'est pas seulement un parti protestataire mais "aussi un parti de gouvernement", précise Marine Le Pen, directrice stratégique de la campagne présidentielle.
Pour ce troisième tour, M. Le Pen se revendique du populisme. Un populisme "qui transcende la gauche et la droite", précise-t-il. Une gymnastique qui l'amène à courtiser les classes populaires avec des accents et des formules antimondialistes tout en ménageant son aile droite.
"LES COPAINS DU MEDEF"
S'il renvoie dos à dos les "libéraux-sociaux et les sociaux-libéraux", il s'en prend plus particulièrement aux "théoriciens libéraux", "les libéraux mondialistes à la solde du Medef", et dénonce la "mondialisation sauvage, face à l'individualisme consumériste", "cette politique dite libérale produisant chômage de masse, pauvreté, assistanat, travail clandestin et stagnation des salaires".
Il prend la défense des petits patrons "sacrifiés (...) sur l'autel de la mondialisation, des stock-options, des copains du Medef et des fonds de pension" et des ouvriers "rebelles aux restructurations et aux délocalisations", mais aussi, pour la première fois, et à la grande satisfaction de Marine Le Pen, des "fonctionnaires", que l'on dit "forcément absentéistes" et que l'"on veut rendre responsables de la destruction des services publics, alors que, le plus souvent, (...) ils en sont les premières victimes". Le nouveau Le Pen se veut "conscience progressiste", se fait chantre de la "laïcité", vante la "France de l'économie mixte voulue à la Libération" et regrette l'abandon du Plan qu'il vouait pourtant aux gémonies quand il était député, de 1986 à 1988. "L'Etat national doit être un Etat social", clame-t-il.
Ce souci social affiché trouve ses limites. Il se conjugue par exemple avec la disparition progressive de l'impôt sur le revenu et avec la fin de la "retraite à 60 ans". Chacun doit pouvoir, selon M. Le Pen, travailler aussi longtemps qu'il le désire.
De même, seraient abrogées les 35 heures s'il venait au pouvoir. Disparaîtraient la couverture maladie universelle (CMU), réservée aux plus démunis, qualifiée de "sommet de l'irresponsabilité" ainsi que l'aide médicale d'Etat (AME) affectée aux étrangers sans papiers. Car ce "social" s'appuie sur la "préférence nationale" et exclut toute prestation sociale pour les étrangers.